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Les États généraux du film documentaire 2017 Édito

Édito


D’une forme d’errance peuvent naître les plus belles associations : les idées mûrissent parfois longuement avant de prendre forme, de pouvoir être formulées. Les programmations sont un processus de sédimentation, au cours duquel des films, des œuvres se déposent, s’ancrent dans la mémoire. Puis cette accumulation de traces dessine un chemin. C’est un cheminement semblable qui nous a conduits cette année à deux ateliers autour de la mémoire. Des cinémas qui arpentent, explorent, déambulent pour faire surgir une mémoire des lieux ou bien qui composent le territoire d’une mémoire où l’Histoire s’immisce. Les nombreux réalisateurs conviés partageront avec nous leur expérience et leur réflexion pour articuler toujours plus étroitement « une archéologie de la mémoire et une cartographie sensible des territoires », la démarche archéologique d’un cinéma qui tente de déceler et de révéler dans le présent d’un territoire les stigmates de l’Histoire mais aussi d’une mémoire. Les films libanais récents de la « Route du doc » portent encore les traces de l’Histoire tragique et violente des guerres traversées par ce pays, terre d’accueil autant que de départs, et tentent de trouver une manière de surmonter le réel, de l’affronter, une tentative d’inscription de soi dans le monde, quand la mémoire et l’Histoire ne sont plus seulement affaire d’héritage mais construction au présent.
L’« Histoire de doc » consacrée à la Pologne repose sur une exploration du cinéma à travers l’Histoire et celle des formes cinématographiques. « Le champ politique du documentaire reste-t-il cet espace où les formes peuvent encore bouger, accompagner le monde dans ses frémissements, dans sa déréalisation même ? » C’est à cette recherche d’expériences que se sont attachés Dominique Auvray et Vincent Dieutre, à qui nous avons confié cette année la programmation « Expériences du regard ».
Et si c’est un honneur d’accueillir Peter Nestler et Guy Sherwin, c’est aussi un bonheur de proposer des expériences de cinéma aussi radicales. Alors que Guy Sherwin nous ramène au silence et à la lumière de la pellicule et, avec elle, à une autre expérience de la perception, l’œuvre de Peter Nestler réaffirme la nécessité d’une liberté de formes et d’une parole critique. D’un geste cinématographique d’une belle intensité, c’est une autre parole tout aussi précieuse, celle de Jean Oury, qui nous donnera à penser au cours d’une « Séance spéciale » entre deux films et les deux créateurs hors norme que sont Jean Oury et le metteur en scène Claude Régy. Y surgiront des liens inattendus, notamment dans leur attachement aux mots, et à la manière de les dire, de les entendre. D’autres radicalités qui nous ramènent à des manières de faire, à la recherche d’expériences et de formes qui construisent des regards autres, auxquels sont conviés les spectateurs. Et nous voudrions nous réapproprier des mots de Claude Régy : « Pour moi (pour nous), c’est important que le public ne se trompe pas sur ce qu’il vient chercher au théâtre (au cinéma).
Il vient créer. »

Pascale Paulat et Christophe Postic