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Les États généraux du film documentaire 2008 Fragment d'une œuvre : Michael Grigsby

Fragment d'une œuvre : Michael Grigsby


Sans aucun doute, lors du programme « Histoire de doc : Grande Bretagne », Michael Grigsby vous fera partager sa passion pour l’histoire documentaire de son pays et son attachement particulier à l’œuvre de John Grierson. Ce programme ne pouvait s’achever sans un prolongement autour de son impressionnante filmographie, encore méconnue en France. Né en 1936, à Reading, passionné par le documentaire depuis l’enfance, Michael Grigsby a réalisé une trentaine de films depuis les années cinquante.
Témoignages des mutations de la société britannique, ces films rendent compte des problèmes sociaux qui touchent les classes populaires. Indéniablement engagé, Michael Grigsby ne se contente pas de dénoncer les injustices et les traumatismes au sein de son propre pays, il sera l’un des premiers à recueillir la parole de trois jeunes Texans, vétérans de la guerre du Vietnam, dans I Was a Soldier, en 1970. Le premier plan du film donne le ton. Un long plan fixe, une longue route au fin fond du Texas, une voiture approche lentement au loin, on la suit du regard, elle semble surgir et nous frapper de plein fouet comme nous frapperont ensuite les paroles de ces jeunes vétérans, originaires d’un État d’Amérique situé bien loin des manifestations anti-militaristes.
Lente immersion… Prendre le temps, offrir l’espace et le temps nécessaires à l’émergence de la parole, Michael Grigsby recueille patiemment, avec une grande humanité, celle de ses protagonistes et n’hésite pas à privilégier le silence et la mise en valeur de l’espace sonore à l’utilisation du commentaire. Dans A Life Apart, réalisé pour Channel Four en 1973, la sobriété de quelques intertitres, l’alternance d’entretiens et de longs et lents plans du chalutier dénoncent les rudes conditions de travail des pêcheurs, et nous incitent à la réflexion, à la méditation.
Un cinéma de poésie qui semble peu adapté à la diffusion télévisuelle, si chère à Michael Grigsby. C’est pourtant avec la BBC qu’il réalise The Score, en 1998. Cette fois, c’est dans l’univers du football qu’il nous immerge. Mais, contre toute attente, aucune trace de joueurs, c’est aux supporters de Sheffield qu’il porte attention. Images et sons composent une belle partition où chaque plan dessine un magnifique tableau naturaliste. Aucun entretien, pas de son direct, une superbe composition musicale originale suffit à renforcer l’intensité des expressions et des sensations.
Élément essentiel du travail de Michael Grigsby, la bande son est méticuleusement travaillée dans chacun de ses films : entrelacement de sons naturels, de dialogues qui précèdent souvent l’entrée en scène des personnages (immersion lente du spectateur dans leurs problématiques) où la musique, prudemment utilisée, intervient à contrepoint, parfois même en contradiction avec l’image apportant une fine touche d’ironie. Dans Rehearsals (2005), chants, musiques, poésies, interviews et sons directs s’entremêlent avec soin et dressent le portrait complexe de Belfast. Une fois encore, Michael Grigsby nous livre une fine composition de l’image et du son, si représentative de l’originalité de son œuvre.

Pascale Paulat


Invités : Débat en présence de Michael Grigsby.